Black Forest
Le plus ancien four de verrier de la Forêt-Noire remonte à 1218. Il n’était pas rare de voir de petites colonies s’établir autour de ces fours car les souffleurs de verre et leur famille devaient rester à proximité. Il en allait de même pour les fabricants de potasse et les charbonniers qui fournissaient les ingrédients de base nécessaires à la production du verre. Seule une petite partie du bois récolté était transformée en charbon, tandis que plus de 90% servait à fabriquer la potasse qui permettait de baisser le point de fusion du sable et donner un aspect brillant au verre. Le bois était donc une ressource essentielle à la production. Le verre produit dans la Forêt-Noire était souvent contaminé à l’oxyde de fer, ce qui lui donnait sa teinte verte caractéristique de la région. Les arbres qui s’étendaient à l’infini permettaient aux fabricants de disposer d’une matière première quasi inépuisable. Ils n’avaient qu’à se déplacer tous les trois ou quatre ans. Les ateliers des verriers étaient alors transformés en fermes par les familles qui pouvaient vivre de l’agriculture et de l’élevage. De nombreuses exploitations virent le jour dans la région, dont certaines finirent par devenir des villages, puis des villes. L’industrie du verre joua longtemps un rôle de premier plan dans l’histoire de la Forêt-Noire.
J’attendais sa sortie avec une certaine impatience. J’avais vu les différentes images qui trainaient sur le web, lu des critiques vraiment positives sur le jeu, visionné les vidéos des influenceurs l’ayant reçu en avant-première. Il coche toutes les cases de ce que j’aime dans un eurogame et je m’intéresse de toute façon à tous les titres de l’auteur Uwe Rosenberg que j’affectionne tout particulièrement. Il faut que je précise que je n’ai jamais joué à la route du verre, dont il est issu. J’ajouterai que la couverture de la boite est réellement superbe et que dire des cadrans de ressources, idée géniale de l’auteur. Il n’en fallait pas plus, pour que j’achète le titre dès sa sortie. J’ai reçu le jeu le vendredi, le samedi, je me penchais sur les règles et le samedi soir, on entamait notre première partie avec ma compagne. Le dimanche pluvieux nous a permis d’en refaire une, etc..
Je ne vais pas vous détailler ici les règles, vous pouvez avoir un aperçu global sur l’express que j’ai publié précédemment, mais je vais vous donner mon avis autour de 5 grands thèmes : l’édition, la thématique, les mécaniques, les règles, le solo et je terminerais cette chronique par mon ressenti global.
Pour avoir un aperçu global de Black Forest, rendez-vous sur l’Express
Est ce que c’est Beau (édition) ?
Commençons par cette couverture incroyable. On a tout de suite envie de découvrir ce qui se cache derrière. Un travail juste magnifique de Lukas Siegmon, qui n’est pas un inconnu dans le milieu, puisqu’il a déjà œuvré entre autres sur Café de fleur, Discordia, Age of Innovation, Applejack, Hallertau et bien d’autres encore. Mais pour moi, il signe ici une de ses plus belles illustrations. Tout cela étant, bien entendu, parfaitement subjectif. Juste une petite déception concernant le logo Super Meeple bien trop présent à mon avis. J’aurais apprécié qu’il soit moins flashy pour profiter pleinement de l’illustration.
Dès que l’on a la boite entre les mains, cela nous donne immédiatement envie de découvrir ce qu’il se cache à l’intérieur, comme un cadeau en fait. Il y a beaucoup de matériel, plutôt de bonne qualité, seul petit hic, les fameux plateaux avec les cadrans de ressource, en double couche, qui gondolent. J’avoue que cela m’agace particulièrement quand cela arrive, d’autant plus quand c’est un élément principal du jeu. J’ai entendu certains dires que la beauté de la boite ne transpirait pas dans le reste du matériel. Pour être totalement honnête, je n’ai pas ressenti cela, bien au contraire. Je trouve que l’ensemble est plutôt joli et que cela donne une belle présence sur la table. J’en ai profité pour imprimer des éléments en 3D afin de faciliter la mise en place.
Notre objectif c’est quoi (thématique) ?
Vous commencez la partie avec un humble domaine. Pour l’étendre, vous allez voyager dans la Forêt-Noire de village en village pour y embaucher des ouvriers. Ils vous aideront à construire de nouveaux bâtiments, travailler la terre et élever votre bétail. Développez votre atelier de maître verrier pour étendre votre domaine et accueillir de nouveaux bâtiments. À la fin de la partie, le joueur qui aura obtenu le plus de points (principalement via ses bâtiments et son bétail) est déclaré vainqueur.
J’ai cherché un petit moment ce que j’allais pouvoir vous raconter dans cette partie de ma chronique. C’est évidemment difficile pour moi, ayant un profil de joueur, préférant largement la mécanique au thème, pour lequel j’ai souvent peu d’intérêt et qui ne représente pas grand-chose pour moi. Malgré tout, et pour une fois, les deux ont relativement du sens et s’accordent parfaitement. Dans la forêt noire, les ressources minérales et les matières premières régionales ont entrainé la création de nombreuses verreries. En effet, l’abondance de bois de hêtre, de sable de quartz mélangé à la potasse, de bois de sapin et d’épicéa nécessaires pour le « Schmelzfeuer » (feu de fonte), favorisèrent l’implantation de l’artisanat verrier. On retrouve tout cela dans la fine exploitation des ressources, ainsi que dans les déplacements et la coupe du bois.
Après, il ne faut pas non plus se mentir, à moins que vous soyez un fan absolu des verriers allemands de la Forêt noire au XIIIe siècle, vous serez conquis par la thématique au point de vous y retrouver. Dans la majorité des cas, vous l’oublierez très vite. Mais cela n’empêche en rien la grande qualité du titre et il en fallait forcément un. On peut d’ailleurs se poser légitimement la question. Le seul avantage que j’y vois finalement, c’est que j’ai parcouru quelques publications sur la toile pour en apprendre un peu plus sur la Forêt noire et l’histoire du verre.
C’est dur à apprendre (règles & iconographie) ?
Règles
Enfin, une règle qui est claire, limpide et surtout facile à lire et à comprendre. Je peux vous le dire pour en lire beaucoup, en ce moment, c’est plutôt l’inverse, avec énormément de jeu. D’ailleurs, je l’ai relu deux ou trois fois, persuadé que j’étais surement passé à côté de quelque chose. Que nenni, elle est tout simplement parfaite, un exemple à prendre par beaucoup. J’aime ces jeux à l’allemande où l’improvisation et la boule de cristal ne sont pas obligatoires. En fin de celle-ci, on retrouve des annexes expliquant l’ensemble des éléments du jeu, bâtiments, missions, ouvriers, ce qui permet rapidement de s’ôter un doute durant la partie.
Iconographie
Je dirais quasi parfaite et claire, on comprend celle-ci de suite si on à l’habitude de ce type de jeu. On se pose peu de questions, tout au plus lors de la première partie, on vérifie sur le livret de règles pour être sûr.
On fait quoi dans le jeu (mécanique) ?
Un tour standard consiste en 3 étapes (max.), dans cet ordre précis : Dépenser 1 marchandise (facultatif), se déplacer, faire une ou des actions.
Maintenant, parlons un peu de mécanique et ce qui fait que j’apprécie particulièrement ce jeu. En premier, il y a de la gestion de ressources avec ces deux cadrans, une idée géniale qui, outre parfaitement servir le thème, donne de la profondeur au jeu. L’optimisation des ressources, des gains et des dépenses vous permettra de vous développer afin d’obtenir plus de points de victoire et d’options tout au long de la partie. Cette gestion fine vous fera hautement cogiter pour obtenir le meilleur. Le tout combiné avec les déplacements de son personnage (pose d’ouvrier). Savoir enchainer correctement ses déplacements pour obtenir ce que l’on souhaite dans le but de maximiser l’ensemble, vous demandera une belle gestion mentale. Même si cela va vous paraitre bizarre, ça me fait penser aux Ruines Perdues de Narak, où il faut prévoir et anticiper le gain et l’utilisation de ses ressources pour faire le plus d’actions possibles.
Mais tout ne s’arrête pas à cela, il y a aussi une mécanique sur le marchand ambulant. La première chose que l’on peut faire durant son tour, c’est de payer une marchandise pour pouvoir intervertir le marchand ambulant avec une autre tuile d’ouvrier. C’est très malin et cela permet d’introduire de l’interaction dans la partie (enlever une tuile à un joueur), mais également de s’en rapprocher une. Cela donne par ailleurs un plateau de jeu mouvant tout au long de la partie, il faudra parfois adapter sa stratégie en cours de route. Moi, j’adore et on l’utilise finalement beaucoup parce que cette tuile permet de gagner deux ressources identiques tout en offrant la même à ses adversaires. Cette action devient même obligatoire pour avancer sur le cadran (droit) qui permet de s’approcher du déclenchement de la fin de partie.
Enfin, vous développerez votre lopin de terre en achetant des bâtiments à l’aide des ressources que vous aurez amassées. Ces bâtiments vous permettent de vous aider tout au long de la partie en plus de vous rapporter des points de victoire. C’est aussi une manière d’axer votre stratégie en faisant un petit moteur dans tel ou tel domaine, comme l’élevage du bétail. J’ajouterais qu’il y a aussi des missions que l’on peut réaliser qui permettent d’obtenir encore plus de ressources, aidant à la construction de bâtiments plus grands, rapportant évidemment plus de points de victoire en fin de partie. À noter que cela peut devenir une course, se dépêcher de déclencher la fin de partie peut vous aider à gagner, c’est ce que j’ai fait lors de ma dernière partie.
Voilà pour la majorité des mécaniques et de ce que l’on peut faire durant une partie de Black Forest. Il y a pas mal de stratégies à explorer. De quoi faire durer le plaisir et le ressortir assez régulièrement. Mais attention, ne surtout pas y jouer avec des joueuses ou joueurs qui veulent tout analyser, entre tous les bâtiments, les déplacements possibles, le marchand ambulant qui change la donne, cela peut vite tourner au chauchemard et ralentir considérablement votre partie.
Un petit mot du Solo….
J’ai commencé par jouer à Black Forest en Solo, je peux donc vous en dire un peu plus. On n’utilise pas un set de cartes ou d’autres éléments pour simuler un joueur humain (Automa), c’est juste une petite modification des règles, assez simple au final, qui permet de jouer seul. La partie va durer cinq années (manche), lors de chacune d’elles, on va jouer cinq tours. Les étapes de chaque tour font appel aux mêmes règles que pour le jeu à plusieurs. La manche se termine lorsque que l’on a placé les cinq pions. On a donc 25 tours pour arriver à faire son meilleur score.
Ce n’est pas ce que je préfère dans un mode Solo, mais cela a plusieurs avantages : la simplicité de prise en main et l’apprentissage des règles. Finalement, je me suis bien amusé et j’ai profité de mon jeu, sans que cela soit ennuyeux, bien au contraire.
Finalement on en pense quoi (conclusion) ?
Je ne vais pas y aller par quatre chemins, Black Forest est pour ma part un des meilleurs jeux experts de cette année. Décidément, Super Meeple arrive encore une fois à faire mouche. C’est un éditeur qui compte beaucoup pour moi, la preuve : j’ai acquis la quasi-totalité de leurs titres sortis cette année.
Il demandera du temps et de l’investissement comme tous les jeux de cet acabit, mais il en vaut la chandelle. Vous pouvez optimiser au mieux vos ressources et votre stratégie en vous chauffant la cervelle, mais vous pouvez également explorer de nouvelles possibilités en profitant de votre jeu, sans forcément chercher absolument la victoire. Tout dépend de votre profil de joueur. Pour moi, c’est souvent le chemin qui est important, et pas forcément la destination. Je prends autant de plaisir à jouer et à découvrir qu’à gagner.
Un petit coup de chapeau pareillement au deuxième auteur crédité sur le jeu, Tido Lorenz, qui a su remanier et remettre au gout du jour un ancien jeu d’Uwe Rosenberg qui se nommait La route du verre. J’aurais aimé en savoir plus sur cette partie. On sait juste qu’il a participé à la nouvelle mouture de Terres d’Arles ainsi qu’à son extension. Il a par ailleurs travaillé sur une extension de viticulture.
Le génie de Black Forest réside vraiment dans ces deux roues crantées qui permettent la gestion des ressources. C’est diablement efficace et nous retrouverons cette mécanique dans Kanal, un jeu pour deux joueurs, bientôt réédité chez Sylex Edition. Finalement, les seuls petits reproches que je peux avoir sont purement esthétiques, ils me font juste pester un peu, mais ce n’est qu’anecdotique comparé au plaisir immense que me procure le jeu. C’est mécaniquement irréprochable, tout en proposant une thématique qui s’intègre parfaitement bien. J’ose le dire, même si pour certains ce n’est pas le bon terme, c’est un vrai coup de cœur (brusque emballement pour quelque chose ou quelqu’un) que j’ai pour ce titre. J’ai tout le temps envie de faire une partie pour essayer d’autres axes stratégiques, mais j’ai également hâte de le faire découvrir à d’autres joueurs de mon entourage. Une excellente pioche pour cette fin d’année et pourquoi pas un beau cadeau sous le sapin de Noël, pour des joueurs plutôt aguerris.
Pilou.
BIEN ❤ |
MOINS BIEN 😢 |
◗ Règles faciles, limpides ◗ Tourne comme une horloge ◗ Les Différentes Stratégies Possibles ◗ Les Cadrans de Ressources |
◗ Le Logo Super Meeple sur la couverture |
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